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Полине Тургеневой - Письма (1855--1858) - Мемуары и переписка- Тургенев Иван Сергеевич9 (21) июля, 18 (30) июля 1858. Спасское Spasskoie, ce 9/21 juillet 1858. Chere et bonne madame Viardot,-- je commence ma lettre par une nouvelle affligeante pour tous les Russes; le peintre Ivanoff, dont je crois vous avoir parle dans mes lettres de Rome, vient de mourir du cholera a St-Petersbourg2. Pauvre homme! apres vingt-cinq annees de travail, de privations, de misere, de reclusion volontaire, au moment ou son tableau venait d'etre expose, avant d'avoir reeu une recompense quelconque, avant meme de s'etre convaincu du succes de cette ?uvre a laquelle il avait voue toute sa vie,-- la mort, une mort subite comme un coup d'apoplexie, mais plus cruelle, car elle ne frappe pas a la tete! Un mechant article de journal qui lui disait des injures - des delais, des dedains calcules, voila tout ce que sa patrjie fui a offert dans le court espace de temps qui s'est ecoule entre son retour et sa mort3. Quant a son tableau, il appartient certainement a cette epoque de l'art ou nous sommes entres depuis un siecle et plus, et qui est, il taut bien l'avouer, une epoque de decadence; ce n'est plus de la peinture pure et simple, c'est de la philosophie, de la poesie, de l'histoire, de la religion; il y a des defauts deplorables, mais c'est pourtant une grande chose, une ?uvre serieuse, elevee, et dont il faut desirer l'influence en Russie, ne fut-ce que comme reaction a l'ecole fondee par Bruloff4. Le 18/30 juin. {Так в подлиннике.} Voici ce que j'ai fait, theuerste Freundinn, pendant les 9 jours qui viennent de se passer5: j'ai beaucoup travaille a un roman que j'ai commence et que j'espere finir pour le commencement de l'hiver6; puis je suis alle a la chasse a 150 werstes d'ici et j'y ai perdu inutilement 5 jours, car les marais etaient encore vides; le temps de la migration des doubles et des becassines n'est pas encore commence.-- Je m'occupe en meme temps, avec mon oncle, de l'arrangement de mes rapports avec les paysans: a partir de l'automne, ils serons tous mis a l'obroc, c'est-a-dire que je leur cederai la moitie des terres pour une redevance annuelle, et je louerai des travailleurs pour cultiver les miennes. Ce ne sera qu'un etat transitoire, en attendant la decision des comites: mais rien de definitif ne saurait etre fait d'ici la7. Je viens de vous mentionner un roman que je suis en train d'ecrire; que j'aurais ete heureux de vous en soumettre le plan, de vous exposer les caracteres, le but que je me suis fixe, etc.-- comme j'aurais receuilli precieusement les observations que vous m'auriez faites! Cette fois-ci, j'ai longtemps medite son sujet, et j'eviterai, je l'espere, ces solutions impatientes et brusques qui vous choquaient a bon droit. Je me sens en veine de travail, et pourtant l'ardeur de la jeunesse est deja loin de moi; j'ecris avec un certain calme qui m'etonne moi-meme; pourvu que l'?uvre ne s'en ressente pas! Qui dit froid, dit mediocre. Je vois assez souvent Feth; il demeure a une quinzaine de verstes de Spasskoie8. Malgre ses ridicules, c'est un tres brave gareon, et qui, en Russe, a de l'esprit et de l'originalite. Il vous garde un souvenir enthousiaste; je ne lui dis pas, comme vous pouvez bien le croire, ce qu'on pense de lui chez vous9. Je vous ecris a Gourtavenel, quoique vous ne m'ayez pas encore dit de le faire: mais je suppose que vous ne devez plus etre a Londres maintenant10. La saison est a sa fin.-- Je viens de recevoir l'"Athenaeum" avec un petit article sur vous dans "La Somnambule"11, qui m'a fait le plus grand plaisir. C'est en anglais, n'est-ce pas, que vous chantez? Pensez un peu a moi et ecrivez-moi pendant votre sejour a Gourtavenel. Quant a moi, je pense constamment - je puis le dire sans exageration - meme pendant mon travail - a tout ce que j'ai laisse, a tout ce que j'aime en France. Portez-vous bien, vous et tous les votres, dites mille choses de ma part a Viardot, et mettez-moi aux pieds de Didie12. Je vous serre bien cordialement les mains et suis votre Tourgueneff. |
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