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Полине Виардо - Письма (1866-июнь 1867) - Мемуары и переписка- Тургенев Иван Сергеевич1(13) апреля 1867. Петербург Saint-Pétersbourg, Karavannaïa, No 14. Samedi, 1/13 avril 67. Eh bien, chère Madame Viardot, me voilà ici, chez le vieux papa Botkine1 - je suis arrivé ce matin par un ouragan de neige - comme à Moscou - jamais on n'a vu rien de pareil - c'est le royaume de l'hiver. Ma première question en arrivant a été: "A quand nia lecture?"2. Car il faut que vous sachiez que je dois lire ici des fragments de mon roman pour notre fond littéraire - il m'a été impossible de m'y refuser. J'ai appris que l'exécution ce faisait lundi soir - après-demain - cela fait que je pourrai partir dès mardi. C'est un jour plus tard que je ne l'avais espéré... Enfin, patience! Si rien ne m'arrive de fâcheux - les bords de l'Oos me reverrons vendredi le 19 avril3. J'enverrai un télégramme de Berlin4. Savez-vous que d'après les apparences - le premier habitant de ma maison pourrait bien être un général franèais? On est persuadé ici de l'imminence de la guerre5 - et cette persuation se traduit entr'autres par une baisse terrible sur nos fonds. J'ai eu beaucoup de peine aujourd'hui à changer 1 500 roubles - à 3 f 25 cent le rouble - et on en donnait 3 f 36 et 38 c - il y a une semaine. On prétend - il est vrai - que tous ces bruits de guerre ne sont après tout qu'une manœuvre de Bourse et que dans une quinzaine de jours le cours s'améliora... "Ma chi lo sa?" J'ai confié le reste de mon argent - 2 000 r à Botkine pour qu'il me l'expédie dans un moment plus opportun. Si la guerre éclate, elle sera terrible - et personne ne peut savoir où et comment cela finira. Espérons que nous n'entendrons le canon à Bade que de loin. La Russie se mettra avec la Prusse - il n'y a aucun doute à cela - ou plutôt elle tiendra l'Autriche en respect6. Voilà le coup de grâce de l'Exposition7. J'ai passé ma dernière journée à Moscou bien tranquillement chez moi - et ce n'est que le soir que j'ai reèu de Katkoff les dernières épreuves, définitivement arrêtées - je veux dire - comme rédaction8. Ces tiraillements m'ont donné sur les nerfs. Les quelques passages supprimés seront rétablis dans l'édition séparée9. Un Mr Tchaïeff, qui avec le comte Sollogoub a participé à la lecture publique de Moscou, est venu me voir et m'a lu des fragments d'une chronique dramatisée qui a pour héros notre grand brigand populaire, Stenko Razine10. Mr Tchaïeff manque d'imagination poétique - mais il est profondément versé dans l'histoire de la Russie et il manie parfaitement la langue. Et puis c'est un charmant homme, fort sympathique. Je suis pourtant bien content d'être hors de Moscou; je ne sais pas si c'est parce que je me suis rapproché de l'Europe, mais je n'ai plus cette sensation d'anxiété, comme si les murs d'une prison m'entouraient11. Et pourtant on a été si bon pour moi à Moscou12! Et Massloff - quel excellent et brave garèon... garèon de cinquante ans et ayant le titre d'Excellence! Le mot de ce "Räthsel"13 est, je crois - que Moscou est plus loin de Bade que Pétersbourg. Je vous écrirai après-demain lundi - ce sera ma dernière lettre14. Tous les billets pour la lecture sont déjà pris: il y aura foule. Je vous en donnerai des nouvelles de vive voix. J'écris à Viardot 4. Mille amitiés à tout le monde et le shakehands le plus cordial à vous. Der Ihrige J. T. |
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